Conclusion d’une belle analyse de la sociologie de la Ville de Québec, gracieuseté du Soleil (ici, ici et ici) et du sociologue Michel Lemieux (on en parle ici et ici!):
« En fait, seule une nouvelle alliance entre les «boomers» et les X pourrait faire redécoller la région. Les projets des uns et des autres doivent être identifiés et partagés, pour devenir des projets communs. Comme cela s’est fait ailleurs ou en d’autres temps, les clivages naturels de génération et de statut social n’ont pas à être des fossés infranchissables et s’élargissant. Ici et là, les diagnostics en termes de projet sont faits. Il s’agit de rassembler… Mais qui ? Comment ? »
On semble identifier trois groupes: les Gras-Dur-Boomers, les Arthuriens et les Jeff. On ne parle pas, malheureusement, d’un autre catégorie, pour laquelle je n’ai pas de nom, mais à laquelle la plupart des gens que je connais appartiennnent. Cette génération qui n’en a rien à foutre des Jeff, des Arthuriens et des Gras-Dur-Boomers. Celle qui prend tranquillement sa place dans le milieu des affaires, dans les rouages du pouvoir, dans le milieu culturel, celle entre 25 et 40 ans, qui « agit » plutôt que « conteste », sans occuper l’espace médiatique ou même politique. Cette génération qui travaille fort à mettre en place des bases et qui trouvent parfois que les Boomers et les X gaspillent un peu trop leurs énergies en débats stériles. Cette même génération qui ne voit plus très bien la différence entre Madame Boucher et Monsieur Lallier, et leur reconnaisse tous deux des qualités de leaders et de développeurs urbains. Une génération qui ne trouve étrangement pas sa voix dans les médias, radio, journaux ou télévision. Mais une génération qui s’infiltre, anime la ville culturellement et économiquement. Une génération qui trouve que l’on donne trop de places aux Boomers et aux X, mais qui, pendant que les une et les autres se démoralisent mutuellement, avance sous les radars, ignorant, lorsque possible, le négativisme ambiant.
C’est le troisième Québec. Vous serez surpris.
Les textes de Michel Lemieux sont intéressants, mais un peu manichéens, c’est vrai — il le faut parfois pour illustrer.
Tu devines que je partage ton opinion à l’effet qu’il y a un large groupe qui échappe à l’analyse du sociologue et dont les réalisations, largement underground (« under promise over deliver », me répètes-tu régulièrement), pourront surprendre dans les prochains mois et les prochaines années — et je veux bien y croire et miser sur cela.
Je m’interroge toutefois profondément à savoir s’il sera possible d’inscrire dans le temps et de planifier le développement d’une ville sur la base de ses énergies sans disposer concrètement, à un moment où un autre, des leviers auxquels seule la politique permet d’accéder.
Il ne s’agit évidemment pas de tomber dans le piège de substituer l’action de terrain par de l’action politique, mais bien au contraire de renforcer celle-ci par un cadre qui permet d’en décupler les effets. Je pense que les défis auxquels une ville comme Québec devra faire face dans les prochaines années exigeront forcément que nous puissions développer une politique qui repose sur l’idée de renforcer chaque fois que possible les initiatives et les actions des gens que tu décris comme « le troisième Québec ».
À tort ou à raison, une catégorie des citoyens de la région estiment que la politique municipale « c’est le couvercle sur la marmitte » — je pense au contraire que ce doit être le feu sous la marmitte. Il faut non seulement faire confiance aux initiatives (en assurant une certaine concertation) mais les encourager et les soutenir, concrètement chaque fois que cela est possible. Il faut privilégier l’action « prise en main » que l’action « pointée du doigt ». Et c’est cela qui ne peut pas se faire sans un véritable leadership politique.
C’est pourquoi, si je crois et j’espère la susprise que tu annonce, je pense que pour en récolter tous les fruits, il faudra qu’un jour ou l’autre, un certain nombre des membres de cette « génération » que tu décris (mais est-ce vraiment une question de génération?) acceptent de consacrer au moins quelques années de leur vie pour s’occuper également de l’espace politique que nous partageons. Conviction personnelle.
Qu’en penses-tu? Peut-être est-ce que je complique les choses?
Un jour, ils prendront naturellement le pouvoir. Si les conditions les poussent à le prendre. Pour l’instant, ils se concentrent sur l’action économique plutôt que politique. Lorsque les conditions gagnantes seront réunies ils seront certainement au pouvoir. Donne leur encore 10 ans, ils faut les voir émerger.
« Naturellement », je ne sais pas. Mais ta sérennité me plaît. il faut y croire.
Carl, sans surprise tes 25 à 40 ans sont les plus optimistes de la région:
« …les 25-45 ans remportent la palme du positivisme, avec seulement 9 % dans les rangs des pessimistes. »
Source:
http://www.cyberpresse.ca/article/20061230/CPSOLEIL/61230075/5019/CPSOLEIL
Excellent post Carl.
Dans une direction similaire, ça me fait penser à un post que j’ai en tête depuis un bout mais n’ai jamais écrit; je trouve ça décevant que « notre » démographique ne soit pas vraiment adressé par les différents partis concernant certains des sujets qui nous touchent comme les lois de copyright, de propriété intellectuelle, l’adoption de l’open source et des formats ouverts par les gouvernements, etc.
Je ne m’attend pas à ce que ce soit des sujets de premier plan mais j’aimerais au moins des prises de position dans leurs programmes et un peu de visibilité.
Le parti Vert avait fait une ouverture en ce sens il y a deux campagnes mais c’était complètement disparu aux dernières élections.